Interview de Geneviève Mannarino, Vice-Présidente du Département du Nord, en charge de l'autonomie

Zoom sur les expérimentations afin de développer l’habitat partagé

Publié le 31 octobre 2017

Le département du Nord a mené plusieurs expérimentations afin de développer l'habitat partagé. Une solution intermédiaire entre le logement et l'établissement spécialisé de type EHPAD. Coup de projecteur sur les initiatives du département en faveur de l'autonomie des personnes âgées et/ou en situation de handicap.

La Rédaction

L'autonomie des personnes âgées est l'une des priorités de la politique départementale. Expliquez-nous pourquoi ?

Geneviève Mannarino

Pour plusieurs raisons. Je pense que c'est d'abord l'expression des personnes âgées, elles-mêmes. Elles veulent pouvoir rester à domicile le plus longtemps possible, ne pas rentrer systématiquement en établissement de type EHPAD, dont le coût est élevé, à la fois pour la personne et les collectivités.

Dans notre département, le défi pour la dépendance est accru, avec un vieillissement de la population important mais aussi des paramètres de santé, des paramètres sociétaux et des paramètres de précarité qui entrent en compte. Nous pensons donc qu'il y a des actions à mener pour favoriser l'autonomie. Mais aussi, en terme de prévention. Quid de l'aménagement du domicile ? Que faire pour que les personnes âgées restent le plus longtemps possible chez elles ?

En même temps, nous avons mené une la réflexion autour des services à domicile, qui interviennent auprès des personnes âgées ou en situation de handicap. Nous avons notamment mis en place tarif unique pour tous les services. Ce qui garantit une meilleure accessibilité pour tous les usagers et sur tous les territoires.

La Rédaction

Vous choisissez notamment de développer l'habitat partagé, une nouvelle forme d'hébergement, pouvez-vous nous en dire quelques mots ?

Geneviève Mannarino

Nous avons mené des expérimentations sur notre département depuis 3 ans, notamment sur le handicap psychique, afin de permettre à des personnes de vivre dans des logements en autonomie. Ces personnes sont accompagnées par une coordinatrice appelée « gouvernante », qui bien sûr peut être un homme ou une femme. L'idée est ici de pouvoir proposer des habitats entre le domicile de la personne commençant à être hors normes en terme de sécurité, et l'entrée en établissement. Là où la personne n'a pas forcément sa place.

Nous avons donc lancé un appel à projet ayant pour but de faire se développer les habitats intermédiaires, accompagnés, adaptés. Désormais, nous voulons mettre en avant l'adaptabilité des logements auprès des bailleurs, des élus, des promoteurs et des aménageurs qui ont réfléchi au sujet : « qu'est-ce qu'un logement adapté » ?

La Rédaction

Parlez-nous de ces défis à venir.

Geneviève Mannarino

Même si elle est bien dans son logement adapté, la personne âgée peut avoir besoin d'un soutien, ne serait-ce qu'administratif, ou pour vérifier si tout se passe bien. Ou encore, pour faire le lien avec toutes les personnes qui interviennent chez elles. Le département accompagne justement ces postes de coordinateurs.

En terme d'hébergement, nous devons proposer des offres très diversifiées et des formules adaptables pour que les personnes puissent faire leur choix. Citons, par exemple, le cas de personnes qui vivent ensemble dans le même appartement et mutualisent leurs prestations. Avec ce type d'habitat partagé, elles bénéficient de plus d'heures d'intervention de service et mutualisent les frais.

Rappelons que le premier souhait de la personne âgée est de rester à son domicile. A nous, donc, de faire en sorte que son logement soit adapté. Avant d'entrer dans un EHPAD, nous devons proposer aux personnes âgées de rester vivre dans leur commune, près du lieu où ils ont l'habitude de vivre. Et pour retarder la dépendance, nous devons aussi mener en parallèle un travail de prévention.

La Rédaction

Et du côté des bailleurs ?

Geneviève Mannarino

Nous devons mener un important travail avec eux. D'abord pour qu'ils puissent intégrer la politique du département sur les personnes dépendantes. Et ensuite, pour voir comment ils peuvent impulser de nouvelles formes d'habitat. Lorsque des programmes de logement sont lancés, il faut se demander de quoi la personne âgée a envie ? Les collectivités telles que la mairie par exemple doivent négocier avec les bailleurs pour mettre en place ces politiques de l'autonomie. Il y a ici de vrais enjeux territoriaux.

La Rédaction

Le département du Nord semble précurseur en la matière, voyez-vous d'autres formes d'habitat partagé se développer sur le territoire français ?

Geneviève Mannarino

Oui, d'autres départements ont mis le même type de système en place. Dans tous les cas, c'est une vraie réflexion sur le choix de vie des personnes qui est menée.

Personnellement, je me suis inspirée d'un modèle dans le département du Tarn : les familles gouvernantes, qui s'adresse en priorité au handicap psychique. Des personnes sont dans le même appartement et mutualisent les coûts. La coordinatrice, c'est à dire, la gouvernante, gère les problèmes de transport, de soins ou autres. Ici, j'ai vu des gens très heureux car ils restaient chez eux.

La Rédaction

Parlez-nous plus en détail des expérimentations menées dans votre département

Geneviève Mannarino

Suite à l'appel à projet sur le département du Nord, nous avons reçu 86 dossiers, toutes formes d'actions confondues. Des expérimentations ont notamment été menées sur Roubaix et Roncq à destination de jeunes adultes autistes, avec la mise en avant de l'autonomie et de la sécurité. Le référent accompagnant ces personnes est, ici, très important.

Aujourd'hui, l'entrée en établissement se fait de plus en plus tard, elle est réservée aux personnes très vieillissantes et très dépendantes. Entre ce qui se passe avant et le domicile, nous avons inscrit plusieurs solutions. Et maintenant, nous allons accélérer les process, en nous donnant les moyens d'accompagner ces personnes.

Je crois qu'aujourd'hui, tout le monde est concerné. Les générations qui vont arriver n'auront peut-être pas l'envie d'aller en établissement médicalisé. Elles sont plus ouvertes que les générations précédentes ou l'on parlait avant tout de sécurisation de la personne âgée et moins d'inclusion. Or, dans les différentes expérimentations menées, nous sommes vraiment centrés sur cette inclusion de la personne.

La Rédaction

Que faire pour que cette inclusion soit efficace ?

Geneviève Mannarino

De nombreuses questions sont à poser. Il faut se demander où l'on installe ces nouveaux logements, ce que permettent les communes... Et en même temps, il y a de nombreux enjeux, juridiques, sociaux, techniques économiques, financiers et en terme de développement du territoire. C'est une vraie démarche de développement de nos compétences départementales. De plus, nous devons aussi être porteurs de bonnes pratiques et de recommandations. Certaines expérimentations ont réussi parce qu'il y avait du dialogue. A nous d'en tenir compte et de formaliser tout cela.

La Rédaction

Comment accompagnez-vous ces différents projets ?

Geneviève Mannarino

Nous les accompagnons de différentes façons. Nous cofinançons des postes de chargé de développement pour élaborer le projet ou des postes de chargés de coordination pour articuler les différents intervenants à domicile. SI la personne bénéficie de l'APA ou de la PCH, nous entrons dans une démarche de mutualisation. Nous pouvons aussi promouvoir des formules de participation à l'investissement.

Ce que je souhaite faire lorsque l'on choisit l'investissement, c'est de pouvoir inclure des solutions d'habitat à la fois adapté et connecté notamment via les solutions domotiques. Dans cette optique, le département du Nord vient d'investir 500.000€ pour 5 porteurs de projets pour les personnes âgées et 9 porteurs de projet dans le handicap. Nous continuerons dans les mois à venir à accompagner ces nouveaux types d'habitat.

Dans le cadre de ces nouveaux projets, nous devrons toutefois émettre quelques recommandations. Je suis par exemple très attentive à la qualité de l'accueil proposé et à sa localisation. S'il est excentré en bordure de départementale il n'y a pas d'inclusion possible. L'accueil doit se situer au sein de la commune. Parallèlement, je vais mener une réflexion de fond avec les bailleurs, pour établir un cahier des charges afin de mettre en place ce type d'habitat innovant.


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