Interview du Ministre de l'agriculture et de la pêche , Michel BARNIER

Le grenelle des animaux et les personnes âgées

Publié le 11 avril 2008

Capgeris

Parlez-nous des rencontres « animal et société » autrement appelées « Grenelle des Animaux » : En quoi consistent-t-elles vraiment ?

Michel BARNIER

Le Président de la République m’a chargé de mener une réflexion sur la protection animale en associant pour la première fois tous les acteurs concernés : les élus locaux et nationaux, les professionnels, les ONG (associations de protection animale, de protection de l’environnement et de consommateurs), des experts, et les administrations concernées qui sont nombreuses.

L’objectif poursuivi est double :

  • d’une part, il s’agit de créer un lieu de débat sur la protection animale ;
  • d’autre part, l’objectif est d’aboutir à des propositions concrètes qui permettront d’améliorer la protection des animaux en France.

J’ai mis en place trois groupes de travail :


  • Le premier présidé par Jean-Louis Etienne, traitera des régimes juridiques de l’animal ;
  • Le deuxième groupe présidé par Jacques Pradel, traitera du rôle et de la place de l’animal en ville ;
  • Le troisième groupe présidé par Jérôme Bignon (député) traitera des animaux élevés pour être consommés et des animaux de spectacle.

Capgeris

Quelle est la genèse de ces rencontres débutées le 14 mars ?

Michel BARNIER

Au moment où le Grenelle de l’environnement a débuté, les associations de protection animale ont demandé à ce que le thème de la protection animale soit traité. Compte tenu de l’amplitude des sujets déjà discutés dans le cadre du Grenelle de l’environnement, le Président de la République a préféré que la protection animale puisse faire l’objet d’un cycle de concertation spécifique.

C’est ainsi que sont nées les Rencontres « animal et société ».

J’ai procédé au lancement des Rencontres le 14 mars. Les trois groupes se sont réunis pour la première fois au cours de la semaine du 25 mars.

Capgeris

Les rencontres avec les éleveurs se sont-elles avérées enrichissantes ?

Michel BARNIER

De ces premières réunions, je retiens tout d’abord une forte volonté de tous les acteurs de débattre. Les premiers échanges se sont tenus sans polémiques. Je note que l’ensemble des acteurs concernés : élus, associations de protection animale, organisations professionnelles….

Ces premières réunions ont surtout permis un premier échange entre les participants. Elles ont aussi permis de commencer à aborder quelques questions sur le fond. De ce point de vue, je peux vous indiquer que les débats sont très riches.

Au cours des prochaines réunions, les propositions des participants seront soumises à la discussion.

Capgeris

Pour en venir à votre visite du jour (ndlr : visite de la maison de retraite de l’Abbaye à Saint Maur des Fosses) : pourquoi un ministre de l’agriculture rend il visite à une maison de retraite?

Michel BARNIER

La démarche peut paraître inhabituelle, j’en conviens. Néanmoins, le vieillissement de la population et le taux de possession d’animaux de compagnie chez les seniors conduisent à réfléchir à leur présence au sein des établissements spécialisés d’accueil. C’est pour cela que j’ai souhaité aller à la rencontre des résidents de maisons de retraite qui ont la possibilité de vivre avec leurs animaux. Cette possibilité n’est pas encore offerte à tous les résidents.

Capgeris

Et pourquoi cet établissement en particulier ?

Michel BARNIER

La Maison de retraite de l’Abbaye à Saint-Maur est justement particulière car elle est exemplaire en matière d’accueil des animaux des résidents. La présence de l’animal auprès des résidents fait pleinement du projet d’établissement.

Par ailleurs, cette maison de retraite est située dans un parc ouvert sur la ville de Saint-Maur : les résidents, avec leurs animaux, peuvent y croiser les autres habitants de la commune qui viennent également promener leurs animaux. Cela favorise le lien social.

Capgeris

Quel peut être l’apport d’une présence animale dans une maison de retraite ? Est-elle courante en France aujourd’hui ? Va-t-elle se démocratiser à l’avenir ? Quel est l’intérêt pour les personnes âgées ?

Michel BARNIER

Parfois, l’arrivée d’une personne âgée dans une maison de retraite est vécue comme une rupture traumatisante avec son milieu social, familial et souvent géographique. L’entrée en maison de retraite est encore aggravée par la nécessité d’une autre séparation, celle d’un animal de compagnie qui a souvent partagé la vie de son maître pendant de nombreuses années.

Pour ma part, je considère que la présence d’un animal de compagnie dans les établissements pour personnes âgées est positive. Cela permet d’atténuer le sentiment de rupture. De même, l’animal incite à la mobilité physique. Il est également un élément très important de lien social : il permet d’entretenir des relations avec d’autres propriétaires d’animaux, le vétérinaire…

Toutefois, l’accueil des animaux dans les maisons de retraite peut susciter des difficultés au regard de la réglementation en matière d’hygiène et de sécurité. Cela peut également représenter une charge de travail supplémentaire pour les équipes para-médicales qui accompagnent les résidents.

Les Rencontres animal et société doivent permettre de dépasser ces difficultés. Afin de favoriser le développement de l’accueil des animaux de compagnie, il serait intéressant qu’un guide soit rédigé pour aider les directeurs réticents ou inquiets d’accueillir des animaux.

Capgeris

Les personnes âgées sont-elles globalement plus respectueuses des animaux que les générations précédentes ?

Michel BARNIER

Je crois que c’est la perception de l’animal dans l’ensemble de la société qui est en train de changer. Pendant longtemps, l’animal a été utilisé pour répondre à des besoins élémentaires de l’Homme : se nourrir, se déplacer…On ne souciait pas de la protection animale, de son bien-être. Cette vision est en train d’évoluer. Cette évolution peut s’expliquer par l’attention croissante que nous portons à l’environnement au sens large, dont les animaux.

Par ailleurs, le rôle social de l’animal se développe rapidement, dans une société de plus en plus individualiste.

Pour répondre à votre question, je crois que cette évolution de la société tout entière se fait sentir également chez les personnes âgées. Les personnes âgées sont certainement de plus en plus attentives aux animaux qui les entourent.

Capgeris

Qu’est-il ressorti de cette rencontre spécifique, et des rencontres déjà effectuées (hors discussions avec les éleveurs) ?

Michel BARNIER

Cette rencontre, qui était la première pour moi autour des Rencontres animal et société, a été pour moi un moment très fort sur un plan humain. J’ai pu mesurer l’attachement des résidents à ces animaux qui sont de véritables compagnons. J’ai pu constater que la présence de ces animaux était source pour eux de grandes joies. La présence d’un animal à leur côté est une ouverture sur l’extérieur.

Capgeris

Quels sont les premiers éléments “confirmés“ qui apparaîtront dores et déjà dans votre rapport de juin ?

Michel BARNIER

Comme je vous l’ai indiqué, les groupes viennent juste de démarrer leurs travaux. Il est donc trop tôt pour en tirer des conclusions. J’attends toutefois que les groupes formulent des propositions concrètes qui permettront d’améliorer le protection des animaux en France.

Capgeris

Un dernier mot à nos lecteurs ?

Michel BARNIER

Le Ministre de l’agriculture que je suis, est très investi sur les questions d’élevage et d’agriculture, je dois aussi m’occuper de la problématique des animaux de compagnie. Je suis conscient de la nécessité de mieux définir le rôle et la place de l’animal dans la société et de parvenir à une relation harmonieuse et équilibrée entre l’animal et l’Homme. C’est mon objectif dans le cadre des Rencontres animal et société


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