Publication de l'Insee - La santé et les soins - Economie et Statistique n° 475-476

Un nouveau numéro de la revue « Économie et Statistique » de l'Insee

Publié le 30 avril 2015


Cette nouvelle publication d'Économie et Statistique (n°475-476) rassemble des articles consacrés à la santé et aux soins.
Ce numéro est aussi l'occasion de saluer la mémoire d'Edmond Malinvaud (1923-2015).

Avertissement
Économie et Statistique est une revue scientifique dont la publication est assurée par l'Insee. Les articles qui y paraissent sont publiés sous l'unique responsabilité de leurs auteurs. Ils n'expriment aucune position officielle et n'engagent ni l'Insee, ni les autres institutions auxquelles ces auteurs appartiennent.

Sommaire

Edmond Malinvaud : 1923-2015 : Parcours d'un économiste d'exception

Edmond Malinvaud nous a quitté le 7 mars dernier, dans sa quatre-vingt douzième année. Retraçant les étapes de son itinéraire professionnel et intellectuel, cet article rappelle ce qu'a été son double apport au système statistique public et à la recherche en économie.

Dossier : LA SANTÉ ET LES SOINS

Introduction : la santé et les soins : prise en charge, déterminants sociaux, conséquences professionnelles

Thomas Barnay, Carine Franc et Florence Jusot

COÛTS ET PRISE EN CHARGE

Conséquences de l'assurance publique et complémentaire sur la distribution et la
concentration des restes à charge : une étude de cas
Les assurances maladie obligatoire et complémentaire, qui contribuent conjointement à la mutualisation des dépenses entre bien portants et malades, modifient de façon différente la distribution des restes à charge et laissent persister une forte concentration sur les individus les plus
malades.
Carine Franc et Aurélie Pierre

Pas de prix mais un coût ? Évaluation contingente de l'aide informelle apportée aux personnes âgées en perte d'autonomie
À travers la valorisation économique de l'aide qu'ils apportent, les proches aidants expriment à la fois leur besoin de reconnaissance et de répit. Les résultats confirment la nécessité de mesures publiques de soutien aux personnes en perte d'autonomie et à leur entourage.
Bérengère Davin, Alain Paraponaris et Christel Protière

Tarification à l'activité et réadmission
Sur la période 2002-2012, incluant la mise en place de la tarification à l'activité des établissements de santé, une hausse des réadmissions à trente jours après intervention chirurgicale est observée, celle-ci n'apparaît pas être liée à cette réforme.
Engin Yilmaz et Albert Vuagnat

LA SANTÉ : DÉTERMINANTS SOCIAUX

L'évolution des inégalités sociales de tabagisme au cours du cycle de vie : une analyse selon le sexe et la génération
Cette analyse des parcours tabagiques issus du Baromètre Santé 2010 montre l'importante augmentation des inégalités sociales de tabagisme et la convergence des tabagismes masculins et féminins avec les générations tout en mettant en évidence des évolutions contrastées au cours du cycle de vie.
Damien Bricard, Florence Jusot, François Beck, Myriam Khlat et Stephane Legleye

Le gradient et la transmission intergénérationnelle de la santé pendant l'enfance
Cet article étudie les relations entre le revenu familial et la santé des enfants et des parents, à partir des données de l'Enquête santé et protection sociale. Il montre que le revenu a un impact sur la santé digestive et pondérale des enfants, indépendamment de l'effet de la santé des parents.
Bénédicte Apouey et Pierre-Yves Geoffard

SANTÉ ET TRAJECTOIRES PROFESSIONNELLES

L'effet des arrêts maladie sur les trajectoires professionnelles
Les risques de chômage et d'inactivité augmentent à la suite d'arrêts maladie lorsqu'ils dépassent 30 jours par an et ce de façon similaire pour les hommes et les femmes. Les salariés semblent anticiper ces risques de pénalités.
Thomas Barnay, Julie Favrot et Catherine Pollak

La survenue du cancer : effets de court et moyen termes sur l'emploi, le chômage et les arrêts maladie
Cet article souligne des effets persistants de la survenue d'un cancer sur l'éloignement du marché du travail, à partir des données Hygie. La trajectoire professionnelle, au cours des cinq années suivant l'apparition de la maladie, est plus dégradée chez les femmes et les personnes les plus âgées.
Thomas Barnay, Mohamed Ben Halima, Emmanuel Duguet, Joseph Lanfranchi et Christine Le Clainche

Pour plus d'information sur ce numéro

  • http://insee.fr/fr/publications-et-services/sommaire.asp?reg_id=0&ref_id=ECO475




Etude et Statistique n°475-476 - Résumés


Résumés


Conséquences de l'assurance publique et complémentaire sur la distribution et la concentration des restes à charge : une étude de cas
Carine Franc et Aurélie Pierre

En France, le financement des soins se caractérise par la juxtaposition des remboursements de l’Assurance maladie obligatoire (AMO) et des assurances complémentaires (AMC). Les dépenses de santé restant à la charge des assurés après intervention de ces deux niveaux de couverture constituent des indicateurs incontournables de l’accès aux soins mais ont été peu étudiées à ce jour, faute de sources nationales adéquates. Cet article vise à pallier ce manque en mobilisant les données administratives d’une mutuelle particulière gérant simultanément l’AMO et l’AMC, permettant ainsi une analyse des restes à charge avant et après intervention de la complémentaire (RACO et RACC). Les données concernent l’année 2002 correspondant à une période d’observation où la population d’intérêt bénéficiait d’un contrat unique de complémentaire santé, c’est-à-dire avant la mise en place d’une surcomplémentaire. L’étude porte donc sur un champ limité et une période relativement ancienne, mais elle permet néanmoins d’illustrer le type d’interaction pouvant exister entre l’AMO et l’AMC.

Dans un premier temps, nous étudions le niveau, la distribution et la concentration des RACO et des RACC sur l’ensemble des dépenses ambulatoires puis par poste de soins. Dans un second temps, nous analysons la concentration des RAC après intervention de l’AMO et de l’AMC en tenant compte de deux indicateurs des besoins de soins : le fait d’être exonéré ou non du ticket modérateur et le niveau des dépenses avant remboursements. Dans notre échantillon, 5 % (resp. 1 %) de la population supportaient en 2002 des RACC de plus de 551 euros sur les dépenses ambulatoires (resp. 1 272 euros). Le RACC des individus exonérés du ticket modérateur était en moyenne 70 % plus élevé que celui de ceux qui n’en étaient pas exonérés. Nous montrons que, même si l’AMO et l’AMC assurent successivement une certaine mutualisation, elles ne réduisent pas de la même façon la concentration des restes à charge qui peut exister sur les individus les plus malades. Ainsi, pour les postes de soins le plus souvent associés à la maladie et pour lesquels il existe une certaine liberté tarifaire (consultations, actes médicaux techniques et autres prescriptions), l’effet mutualisant de l’AMC apparaissait en 2002 relativement faible en comparaison de celui de l’AMO.

Pas de prix mais un coût ?
Évaluation contingente de l'aide informelle apportée aux personnes
âgées en perte d’autonomie
Bérengère Davin , Alain Paraponaris et Christel Protière

Le vieillissement de la population confronte les pays qu’il concerne à certains défis, notamment au regard des soins de long-terme. Prendre en charge une personne âgée en perte d’autonomie génère en effet à la fois des coûts publics et privés qui se chiffrent en milliards d’euros chaque année. L’objectif de cette analyse est d’étudier les déterminants du consentement à payer (CAP) des aidants informels pour l’aide qu’ils apportent aux personnes âgées de 75 ans et plus vivant à domicile, en utilisant la méthode de l’évaluation contingente. Les données utilisées proviennent de l’enquête nationale Handicap-Santé Aidants informels (HSA) de 2008. On y trouve des questions sur le montant que les aidants seraient prêts à payer pour être déchargés d’une heure d’aide. Un modèle en deux étapes à la Heckman est construit afin d’analyser à la fois les facteurs associés aux montants déclarés de disposition à payer, et les raisons pour lesquelles certains aidants n’ont pas voulu donner de valeur (répondants protestataires). D’après les résultats, des caractéristiques telles que la distance entre lieux de vie de l’aidé et de l’aidant ou encore la dégradation de la santé mentale de ce dernier expriment le besoin de reconnaissance des aidants informels à travers les valeurs déclarées qui leur sont associées, ainsi que leur besoin de répit, dû au fardeau qu’ils supportent parfois depuis plusieurs années. Le contexte socioéconomique joue aussi un rôle important : plus le revenu de l’aidant et celui de la personne aidée sont élevés, plus le montant du CAP est élevé. Ces éléments peuvent être utiles
aux politiques publiques en charge de développer des mesures visant tout à la fois à promouvoir l’aide informelle apportée aux personnes âgées et à soulager ceux qui l’apportent.

Tarification à l’activité et réadmission
Engin Yilmaz et Albert Vuagnat

De nombreux pays de l’OCDE ont introduit des systèmes de paiement à l’activité pour financer leurs établissements de santé. La France a ainsi adopté en 2004 la réforme dite de « tarification à l’activité » (T2A) afin d’inciter ces établissements à davantage d’efficience. La mise en place de cette réforme a surtout intégré jusqu’ici l’impératif économique comme première préoccupation. Toutefois, pour le régulateur, il est important de suivre les effets de cette réforme sous l’angle de la qualité des soins. Une mesure de la qualité des prises en charge peut être appréhendée par le taux de réadmission à trente jours.

L’objet de cette étude est de s’intéresser à la réadmission à la fois sur la période qui précède la T2A et sur la période faisant suite à sa mise en place. La période d’étude s’étend de 2002 à 2012. À partir des données du Programme médicalisé du système d’informations (PMSI), pour chaque séjour chirurgical, la réadmission à trente jours après la sortie est déterminée au moyen du chaînage PMSI, sous réserve que ces réadmissions ne soient ni des séances de traitements ni de la néonatalogie. La probabilité de réadmission est modélisée à l'aide d’une régression logistique multiple comprenant les cofacteurs suivants : année, âge, sexe, mode d’entrée, durée de séjour, morbidité, statut juridique de l’établissement ainsi que des termes d’interactions.

Les résultats mettent en avant une augmentation du risque de réadmission observé au niveau global, mais qui s’explique par une modification de la structure de la population (vieillissement) ainsi que par les modifications de prise en charge. Cette hausse des réadmissions ne s’explique pas par la mise en place de la T2A.

L’évolution des inégalités sociales de tabagisme au cours du cycle de vie :
une analyse selon
le sexe et la génération
Damien Bricard, Florence Jusot, François Beck, Myriam Khlat et Stéphane Legleye

Comment évoluent les inégalités sociales dans la consommation de tabac en France selon l’âge et les générations ? Afin de répondre à cette question, les données du Baromètre Santé recueillies en 2010 auprès de 27 653 personnes ont été mobilisées pour reconstruire de façon rétrospective le parcours tabagique de trois cohortes de naissance (1941-1955, 1956-1970 et 1971-1985). L’évolution des inégalités de tabagisme est étudiée à partir de la comparaison des prévalences du tabagisme calculées à chaque âge selon le niveau de diplôme, le sexe et la génération puis à l’aide d’un indice relatif d’inégalité estimé à l’aide de régressions logistiques.

Les résultats montrent qu’après avoir été plus fréquent parmi les plus diplômés, le tabagisme a reculé dans ces milieux, alors qu’il continue de progresser parmi les groupes moins diplômés. Cette analyse confirme également le décalage d’une génération chez les femmes par rapport aux hommes dans la diffusion du tabagisme, même si les niveaux de prévalence sont aujourd’hui forts pour les deux sexes. L’importance des inégalités sociales face au tabagisme ressort aux âges jeunes, pour toutes les cohortes et pour les deux sexes. Pour les cohortes les plus anciennes, les inégalités s’amenuisent au cours de la vie jusqu’à s’inverser chez les femmes. Pour la cohorte la plus récente, les inégalités restent à un niveau élevé tout au long du cycle de vie et tendent à s’accentuer après 25 ans pour les femmes.

Sur la base de ce constat, il pourrait être efficace de cibler les politiques de prévention du tabagisme selon les groupes sociaux et selon les âges de la vie, et en particulier d’axer les efforts sur la prévention de l’entrée dans le tabagisme dans les milieux les moins diplômés.

Le gradient et la transmission intergénérationnelle de la santé pendant l’enfance
Bénédicte Apouey et Pierre-Yves Geoffard

En dépit d’un accès aux soins universel, on observe un gradient de santé dans l’enfance en France, c’est-à-dire une association positive entre le niveau de revenu familial et l’état de santé des enfants.

Cette corrélation peut s’interpréter selon deux chaînes causales qui font toutes deux appel à la santé des parents. Dans une première approche, le revenu familial améliorerait la santé des parents, qui elle-même influencerait positivement la santé des enfants. Dans une seconde approche, la santé des parents aurait un effet à la fois sur le revenu familial et la santé des enfants, créant par là-même une corrélation fallacieuse entre revenu et santé des enfants.

L’effet des politiques publiques sur la santé des enfants sera différent selon les effets à l’oeuvre. Si le revenu des parents influence la santé des parents qui elle-même agit sur la santé des enfants, alors une politique qui augmente le revenu de certains ménages entraînera une amélioration de la santé des parents puis des enfants. Mais si la corrélation entre revenu et santé des enfants est fallacieuse, alors une politique de hausse de revenu n’aura aucun impact favorable sur la santé des enfants. En revanche, si la santé des parents a un effet causal sur la santé de leurs enfants, toute mesure permettant d’améliorer la santé des parents est susceptible de bénéficier également aux enfants.

Cet article utilise les données de l’Enquête santé et protection sociale (ESPS) de 1994-2008 pour étudier les relations entre le revenu familial et plusieurs aspects de la santé des enfants et des parents. Nos résultats suggèrent que le revenu a un impact sur la santé digestive et pondérale des enfants, indépendamment de l’effet de la santé des parents. Ce résultat pointe vers le rôle des conditions de vie dans les inégalités sociales de santé pendant l’enfance.

L’effet des arrêts maladie sur les trajectoires professionnelles
Thomas Barnay, Julie Favrot et Catherine Pollak

À la fin des années 2000, les taux d’emploi des personnes ayant des incapacités en France étaient de 46 % contre 72 % pour les personnes sans incapacités. Si l’on sait évaluer, pour l’Assurance maladie, le coût de l’indemnisation de l’incapacité temporaire de travail pour maladie (6,7 milliards d’euros soit 3,7 % des dépenses de santé en 2012), on ignore encore largement les effets de ces arrêts de travail sur les parcours professionnels.

Cette étude analyse l’effet des arrêts maladie – qui constituent une mesure de l’incapacité temporaire de travail – sur la dynamique des trajectoires professionnelles. Elle mobilise des données administratives de carrière et de dépenses de santé des salariés affiliés au Régime général (panel Hygie 2005-2008). Une typologie est mise en oeuvre pour caractériser les transitions entre cinq états (emploi sans arrêt, emploi avec peu d’arrêts, emploi avec arrêts longs, chômage et inactivité). Le recours à un modèle multinomial dynamique à effets fixes permet d’estimer l’effet des épisodes d’arrêt maladie sur le chômage et l’inactivité d’une année à l’autre en distinguant la dépendance d’état de l’hétérogénéité inobservée.

Nous observons des trajectoires plus durablement dégradées (vers le chômage et l’inactivité
notamment) pour les personnes ayant des arrêts de travail, en particulier lorsque ceux-ci sont dus à des longs épisodes de maladie. Cet effet est comparable pour les hommes et les femmes ; le risque plus élevé d’inactivité après des arrêts longs chez les femmes s’expliquant principalement par l’hétérogénéité inobservée. Si les arrêts courts peuvent a priori s’interpréter comme un marqueur de sécurité de l’emploi, une fois l’hétérogénéité inobservée prise en compte, ils constituent également un facteur de risque pour les salariés dès lors que leur durée cumulée dépasse 30 jours. Les salariés semblent d’ailleurs intégrer ces risques de pénalités en limitant leur recours aux arrêts à la suite d’épisodes de chômage ou d’inactivité.

La survenue du cancer : effets de court et moyen termes sur l’emploi, le chômage et les arrêts maladie
Thomas Barnay, Mohamed Ben Halima, Emmanuel Duguet, Joseph Lanfranchi et Christine Le Clainche

La réduction des inégalités face à la maladie est un des attendus majeurs du troisième Plan cancer 2014-2019, qui préconise de « diminuer l’impact du cancer sur la vie personnelle » afin d’éviter la « double peine » (maladie et exclusion du marché du travail).

Dans ce contexte, nous évaluons l’impact de un à cinq ans d’un primo-enregistrement en Affection de longue durée (ALD) caractérisant le cancer sur la situation professionnelle et la durée passée en emploi, maladie et chômage de salariés du secteur privé. Nous utilisons la base de données administratives Hygie, recensant la carrière professionnelle et les épisodes de maladie d’un échantillon de salariés affiliés au Régime général de la Sécurité sociale. L’évaluation de l’impact de la survenue du cancer s’appuie sur une méthode de double différence avec appariement exact pour comparer les salariés malades aux salariés sans aucune ALD.

La première année après le diagnostic correspond au temps des traitements caractérisé par une augmentation du nombre de trimestres d’arrêts de travail pour maladie de 1,7 pour les femmes et de 1,2 pour les hommes. L’âge joue également un rôle sur les absences liées à la maladie. Par ailleurs, l’employabilité des travailleurs atteints du cancer diminue avec le temps. La proportion de femmes et d’hommes employés au moins un trimestre, baisse respectivement de 8 et 7 points de pourcentage dans l’année suivant la survenue du cancer et jusqu’à 13 points de pourcentage cinq ans plus tard. Cette distance à l’emploi se renforce lorsque les salariés malades sont plus âgés. L’effet de la maladie à cinq ans est respectivement de 15 et 19 points de pourcentage pour les hommes de plus de 51 ans et pour les femmes de plus de 48 ans.

Ces différences de genre et d’âge peuvent traduire des différences de localisation et de sévérité des cancers, d’une part, de séquelles des cancers et de difficultés de réinsertion sur le marché du travail plus importantes avec l’avancée en âge, d’autre part.



Dernières publications en rapport avec les personnes âgées et les seniors


Dernières publications sur le thème des personnes âgées, de la dépendance, des seniors, du maintien à domicile, des maisons de retraite, des résidences avec services pour les seniors ...

Besoin d'informations ?

Un conseiller vous recontacte gratuitement.




© Australis 2024 - Tous droits réservés.  //  Gestion des cookies