Cabinet d'architecure ADMS

Interview d'ADMS Architectes pour le Développement Médico-Social

Publié le 15 mars 2011

ADMS Architectes pour le Développement Médico-Social:

Suite à l'entretien réalisé avec le cabinet d'architecture ADMS, Architectes pour le Développement Médico-Social, nous vous présentons leur travail concernant la réalisation et la restructuration de maisons de retraite. Suivez pas à pas les réponses des architectes : Messieurs AMROUCHE, BESSON et HERBIN aux questions que vous vous posez :

Capgeris

A ce jour, quels sont les établissements d'accueil pour personnes âgées ou maisons de retraite que vous avez réalisés ou restructurés ?

ADMS

Nous avons réalisé des EHPAD à Bourges, Caen, Granville, Niort et Rocquencourt, etc... Sans nous cantonner dans ce secteur d'activité il est vrai que nous nous sommes spécialisés dans le domaine des EHPAD (Etablissement d'Hébergement pour les Personnes Agées Dépendantes) et des cliniques.

Capgeris

Comment avez-vous abordé ces projets ? Quelles sont les spécificités ou défis à prendre en compte lorsque l'on conçoit ce type d'établissements ?

ADMS

Comme pour tout projet, il est nécessaire dans un premier temps de tenir compte des contraintes liées au terrain (accès, orientation, déclivité, qualité du sol, servitudes, etc.), viennent en suite les contraintes techniques et règlementaires qui sont complexes, nombreuses et étendues pour ce type d'établissement (urbanisme, sécurité incendie, normes techniques et sanitaires, accessibilité aux personnes handicapées). Le principe est de définir une ligne de conduite qui fige le bâtiment en terme de volumétrie et d'esthétique, en le faisant valider par les services compétents de la mairie. Il faut ensuite garder cet objectif de forme et de cibles architecturales en intégrant progressivement toutes les contraintes précédemment évoquées.

Capgeris

Comment parvient-on à concilier des espaces de vie avec des espaces médicalisés sans que le lieu perde en hospitalité, en chaleur?

ADMS

Nous faisons en sorte de fondre les espaces médicalisés dans le volume de façon à les faire ainsi disparaître dans les espaces de vie, tout en gardant, bien entendu, leur fonction qui est de soigner et de surveiller. Leur position reste stratégique mais leur présence visuelle est diminuée du fait de l'intégration discrète des équipements médicalisés. Il n'y a donc pas de transition entre les lieux de vie et les espaces médicalisés et l'ambiance chaleureuse créée n'est pas celle de l'hôpital.

Capgeris

Les maisons de retraite souffrent d'une réputation quelque peu négative, on les imagine bien souvent peu accueillantes, cette image est-elle en train de changer ?

ADMS

Nous avons la chance de travailler avec un des leaders de la maison de retraite dont le souci permanent a toujours été la qualité d'accueil des patients et leur bien-être. Dès les premières réunions de réflexion nous avons ressenti sa conscience professionnelle et l'importance qu'il attache à la qualité des espaces de vie qu'ils soient communs ou individuels pour les chambres.

Nous n'avons donc pas été confrontés à ce problème dans les établissements que nous avons réalisés.

Bien entendu, cette image existe, et nous avons été amenés à le constater lors de la restructuration d'établissements acquis par nos clients. Nous considérons que l'origine est souvent économique car certains établissements n'ont pas les moyens financiers de maintenir leurs locaux conformes aux différentes règlementations qui évoluent rapidement et deviennent drastiques. Afin d'éviter la fermeture, ces structures négligent d'autres postes tels que la création d'espaces communs pourtant essentiels et la qualité de vie en général. Aujourd'hui, du fait du durcissement progressif de toutes les règlementations qui obligent les établissements à remettre perpétuellement aux normes leurs locaux, ces établissements à la stabilité économique vacillante tendent à disparaître laissant la place à des groupes plus structurés et offrant des qualités d'accueil incomparables dans des projets bien organisés et des équipes de soins compétentes comportant un effectif permettant d'assurer un suivi optimal.

De nombreuses fermetures sont ordonnées car la DASS est particulièrement exigeante et applique la réglementation avec fermeté. Ces évolutions sont profitables au patient et ce type d'image devrait donc disparaitre du paysage.

Capgeris

Quels sont les nouveaux moyens mis en œuvre pour rendre ces espaces plus attrayants, et les moderniser face à une demande à la fois accrue et plus exigeante?

ADMS

Les volumes proposés ont des proportions de plus en plus généreuses et les finitions sont traitées avec des matériaux nobles dont la qualité est de type hôtelier. Nous accordons une grande importance à la lumière dans l'ensemble des volumes. En effet la lumière a une incidence fondamentale sur le fonctionnement, les volumes, la qualité de vie mais aussi sur l'aspect thérapeutique. C'est ainsi que l'aménagement d'un patio dans le cadre d'une unité protégée pour personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer, outre le fait de créer un lieu agréable de par la luminosité naturelle apportée et la qualité architecturale de l'espace crée, peut permettre également un parcours de déambulation indispensable à la thérapie et offrir un jardin extérieur clos et protégé. Nous voyons ainsi comment une réponse architecturale peut intégrer plusieurs fonctions simultanément.

Capgeris

La modernisation de ces espaces peut-elle se faire sans perdre en ergonomie, élément essentiel pour un public parfois en perte d'autonomie ?

ADMS

Au contraire ! Aujourd'hui la modernisation, les nouveaux revêtements, les nouvelles normes favorisent l'accessibilité. Ces dernières sont crées dans ce sens, elles améliorent l'ergonomie et facilitent ainsi la vie au sein de ces établissements qui sont en totalité accessibles aux personnes handicapées.

Capgeris

On observe de plus en plus d'espaces verts aux alentours des maisons de retraite, s'agit-il d'une tendance générale ? Est-ce là une volonté d'ouvrir ces établissements vers la nature ?

ADMS

Les espaces verts sont profitables à tous, de surcroît dans le cadre de certaines pathologies comme la maladie d'Alzheimer. Pour ces patients les jardins sont énormément bénéfiques et font partie du protocole thérapeutique. D'ailleurs certaines activités s'organisent autour de jardins potagers. Outre l'agrément qu'ils génèrent, les espaces verts dans ce type d'établissements répondent donc à une fonction thérapeutique.

On observe également de plus en plus d'espaces verts en toiture. En effet, des toitures végétalisées sont fréquemment réalisées. Cet espace qui jadis n'était guère valorisé offre ainsi des espaces de qualité, esthétique et fonctionnel ne demandant pas d'entretien ; ils améliorent également les performances du bâtiment d'un point de vue thermique et de développement durable.

Capgeris

Par opposition à la question précédente, comment intègre-t-on ces établissements dans un paysage urbain ?

ADMS

Quant le site n'offre pas la possibilité de créer des jardins, des terrasses paysagées sont assez souvent réalisées. Ces dernières permettent aux patients de bénéficier de véritables espaces verts dans leur environnement urbain immédiat . Nous réinterprétons la charte d'Athènes de LE CORBUSIER et ses jardins suspendus. En effet des fonctions que l'on a l'habitude de trouver au rez-de-chaussée peuvent également être aménagées en étages, par des terrasses entièrement sécurisées.

Capgeris

Comment le choix se fait-il d'installer une maison de retraite en ville ou plutôt en périphérie ? Quelle est la situation idéale ?

ADMS

Il n'y a pas vraiment de situation idéale, les deux environnements ont leurs avantages ainsi que leurs contraintes.

Outre le prix plus élevé du foncier, la ville comporte de nombreux aspects positifs. Enormément de demandes se font en ville car les personnes âgées restent proches de leurs enfants, gardent leurs repères et habitudes, ils cherchent donc naturellement une maison de retraite à proximité. D'autres préfèrent se tourner vers la nature en cherchant un établissement non-urbain et un environnement essentiellement végétal, notamment ceux qui ont eu une vie rurale .

Lors de l'étude du projet il est donc fondamental de s'interroger sur les attentes des patients. Pour une personne vieillissante, le plus important est d'éviter le déracinement, l'isolement, l'éloignement de ces proches. Ainsi, on comprend que les projets, en milieu urbain ou en milieu rural doivent s'adapter à des profils de personnes différents en fonction des habitudes de chacun. L'architecte doit donc s'efforcer d'avoir cette gymnastique de pouvoir concilier ces deux possibilités.

Même si l'intérêt des espaces verts est indéniable, nous pensons qu'il faut se méfier des idées reçues. En effet les patients sont également particulièrement attirés par le mouvement, le monde et la vie en général. Ainsi il peut être surprenant de les voir porter leur attention plutôt sur une rue passante, voire un parc de stationnement que sur un magnifique parc à la végétation luxuriante.

Le projet devra donc orienter les espaces suivant leur fonction plutôt vers l'un ou l'autre, c'est ainsi que l'on positionnera par exemple les salons vers le mouvement, tandis que les lieux de repos tels que les chambres seront de préférence orientées vers des espaces verts plus calmes.

Capgeris

Quelle place accordez-vous au développement durable dans la conception de ces établissements ?

ADMS

Nous sommes heureux de constater l'importance grandissante de la prise en compte des cibles HQE (Haute Qualité Environnementale) et de tout ce qui est relatif au développement durable et à l'économie d'énergie. La consommation d'énergie des bâtiments va être réduite de façon considérable dans les années avenir, nous participons ainsi modestement à l'effort collectif pour préserver la planète. Cette démarche de développement durable est d'autant plus aisée à mettre en œuvre que l'ensemble des acteurs ont fait un effort de formation et ont désormais les compétences nécessaires. En effet, il s'agit d'un travail d'équipe et l'ensemble des intervenants notamment les bureaux d'études techniques doivent être sur la même longueur d'onde. Ainsi ces nouvelles démarches peuvent être maîtrisées et mise en œuvre.

Les maîtres d'ouvrages sont de plus en plus sensibles à ces normes, de même que les résidents. Le fait qu'une maison de retraite soit « labellisée » est un plus indéniable puisque cela traduit un confort ainsi qu'une qualité de vie accrus.

Capgeris

Lorsque qu'une maison de retraite dispose d'un secteur d'accueil pour les personnes désorientées (maladie d'Alzheimer...) comment intégrez-vous les contraintes liées à la protection de ce secteur dans le cadre du projet architectural global ?

ADMS

Le challenge est justement de pouvoir dissocier ce secteur tout en l'intégrant.
Il faut, par exemple, laisser penser aux patients qu'ils sont totalement libres d'aller et venir, alors que, de par leur pathologie, leurs allers et venues sont contrôlés.

Une personne atteinte par la maladie d'Alzheimer a tendance à fuguer, cette contrainte doit donc être intégrée dans la conception des espaces, tout en évitant d'isoler ces patients. Une unité Alzheimer bien conçue doit être noyée dans une maison de retraite sans que l'entité ne soit réellement mise en valeur.

Ce volume sera de préférence aménagé au rez-de-chaussée de façon à faciliter l'application des normes handicapées et bien entendu augmenter l'ergonomie générale. De plus un espace de plain pied avec un jardin offre une certaine liberté dans la conception puisque les déplacements des patients sont facilités.

Capgeris

Avez-vous eu l'occasion de visiter vos créations après que le public y ait été accueilli ? Quels constats avez-vous pu faire, et quel a été votre ressenti?

ADMS

Bien que nous éprouvions beaucoup de plaisir à voir un bâtiment se réaliser, le voir en exploitation est très important, nous visitons donc le bâtiment après la livraison. Nous le faisons systématiquement pour chaque projet, et à chaque fois c'est comme si nous inaugurions notre première réalisation. Les sentiments vécus sont très forts, et lorsque nous voyons le sourire des résidents, c'est peut-être que nous avons atteint notre objectif, que nous avons accompli notre mission mais aussi notre devoir. En effet nous ne perdons pas de vue qu'il s'agit de créer et réaliser le cadre de vie de nos aînés.

Capgeris

Qu'est ce qui vous motive professionnellement et/ou personnellement dans de tels projets ?

ADMS

Construire pour nos aînés, qui pour bon nombre ont connu des périodes très difficiles telles que les guerres, réaliser des établissements aux prestations de qualité leur offrant ainsi un cadre de vie très agréable, donne le sentiment de leur rendre une partie des efforts qu'ils ont fait pour améliorer notre quotidien.

Ainsi, au-delà de l'acte de construire que nous apprécions avant tout, réaliser ce type de projet donne à notre métier, une dimension supérieure, une dimension sociale.

Capgeris

Selon vous comment évolue la manière de concevoir les maisons de retraite ? Quelle est votre vision dans le futur de la structure idéale d'accueil des personnes âgées dépendantes ?

ADMS

Plusieurs évolutions sont possibles, certains voient les maisons de retraite se développer plus hors de la ville facilitant l'application des normes avec un environnement moins contraignant. L'esprit serait celui d'un village de vacances avec de petites unités indépendantes avec un espace de services communs, comme on l'observe aux Etats-Unis ou en Suède. Les maisons de retraites ne disparaîtront pas pour autant du paysage urbain puisque le mode de vie de chacun exige que soient conservées les deux configurations.

Nous pensons que la véritable évolution sera d'ordre fonctionnel notamment avec une ouverture grandissante des établissements vers l'extérieur. Cette tendance est déjà observée à travers les structures d'accueil de jour mais peut s'étendre à d'autres activités ouverte également aux non résidents tels que des commerces, des associations, etc.

Cette ouverture constituera probablement l'évolution la plus significative et peut, d'un point de vue sociologique, être mis en parallèle avec l'évolution de la structure des familles et notamment la place importante de la personne âgée dans la société.

Nous pensons également que les établissements seront de plus en plus « spécialisés » et que les unités pour personnes dépendantes seront regroupées par type de pathologie et degré d'évolution de la maladie.

On voit apparaître d'ores et déjà de plus en plus d'établissements ne regroupant que des personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer, regroupées dans des unités distinctes suivant leur degré de dépendance.

Cela permet une thérapie spécifique appropriée et évite aux personnes les moins dépendantes d'être en contact avec celles qui sont le plus. Cela serait d'autant plus crédible si un traitement médical pour stopper l'évolution de cette maladie voyait le jour.


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